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Les Notes de Lecture de “Nos Causes Communes” – Où vont les Capitalismes ?

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    Les Notes de Lecture de “Nos Causes Communes” – Où vont les Capitalismes ?

    Par noscausescommunes | Contributions libres | 0 commentaire | 9 octobre, 2020 | 0

    La crise sanitaire ne pouvait fournir aux tenants de l’école régulationniste plus belle occasion de démontrer la pertinence de leur thèse. Ce que ne manque donc pas de faire dans son dernier livre Robert Boyer – Les capitalismes à l’épreuve de la pandémie (La découverte, octobre 2020) – en rappelant combien les marchés dépendent pour fonctionner d’arrangements institutionnels (rôle de l’Etat, etc.) que le néolibéralisme tend à ignorer mais que la Covid-19 a replacés au premier rang.

    Robert Boyer nous invite ainsi à comprendre les limites d’une lecture exclusivement économique de ce que nous vivons. Alors que cette crise ne ressemble en rien à celle (2008) qui l’a précédée, l’on s’obstine pourtant à la décrire avec les mêmes concepts, présentant comme une « récession » la conséquence d’une décision politique (le confinement), qualifiant de « plan de stimulation » l’indemnisation des entreprises et de « sauvetage » des mesures économiques dont l’impact dépend en réalité de l’efficacité des mesures sanitaires.». En comprendre les méandres et en anticiper les conséquences, suppose d’adopter une approche large sollicitant les diverses branches des sciences humaines.

    Ainsi de l’histoire des pandémies et des leçons qu’il est possible de tirer de la quinzaine de crises graves qui depuis la Renaissance ont secoué notre humanité : celles-ci ont toujours impliqué les mêmes acteurs (gouvernants, marchands, médecins et églises), généré à chaque fois de l’innovation sociale, poussé généralement, passé une phase de rétraction, au développement de la coopération internationale, pour enfin faire sentir leurs effets sur la longue durée (en moyenne près d’un demi-siècle).

    Fidèle à ses cadres d’analyse, Robert Boyer invite par ailleurs à ne pas céder à la tentation d’homogénéiser la situation. La différenciation des sociétés a en effet induit des types de réponses variées, qui entraîneront des évolutions distinctes des économies et accentueront encore ces différenciations, fracturant un peu plus par contrecoup un système international déjà en crise, et perclus d’ inégalités.
    Loin d’être remis à zéro, considère Robert Boyer, le plus probable est que les compteurs soient, à l’issue de cette crise – imprévisible à ce stade – encore un peu plus déréglés !

    Certes, la Santé, fragile au Sud, fragilisée au Nord, de coût à réduire est devenue actif vital ouvrant potentiellement la voie à un autre mode de développement fondé sur le bien-être dont la culture et l’éducation seraient les deux autres composantes.
    Celles-ci ne sont-elles pas d’ores et déjà les principales pourvoyeuses d’emploi des économies occidentales ? Et les des études de plus en plus nombreuses ne démontrent-elles pas qu’elles sont plus à l’origine de la croissance que sa conséquence ? « La nouveauté radicale du coronavirus, écrit Robert Boyer, a été de bousculer la domination de la finance sur l’économie, de l’économie sur la politique, de la politique sur les choix de santé publique…et de l’égoïsme national par rapport à la constitution de biens publics mondiaux ». Provisoirement ?

    Quelle chance en effet cette perspective d’un retournement des priorités a-t-elle aujourd’hui d’aboutir ?
    La nouveauté ici tient au fait que la crise est venue non des contradictions internes au système économique mais d’un facteur extérieur qui a contraint les gouvernements à bloquer une dynamique dans laquelle les préoccupations de santé publique étaient secondes, et à intégrer des paramètres jusqu’alors hors de leur vision.
    Le choc a par ailleurs conduit à des prises de conscience en matière de production (l’allongement excessif des chaînes d’approvisionnement, les limites du « juste à temps » en période de crise y compris en termes de coût), de consommation (réduite aux biens essentiels), de financement, du rôle de l’Etat (avec l’intervention et le retour à une forme de planification indicative), voire à des transformations ( du rapport salarial avec le télétravail, du régime de concurrence au profit du numérique, et au détriment des industries comme l’automobile ou l’aéronautique, le tourisme).

    Mais sur quoi débouchent aujourd’hui concrètement ces tendances ?
    N’aboutissent-elles pas à consolider plus encore, parce qu’à l’aise avec le confinement et appuyé sur une vaste trésorerie, un capitalisme, émergent depuis la fin du siècle dernier et anglo-saxon, celui des plateformes transnationales, fondé sur la rentabilisation de masses immenses de données, la flexibilité des contrats du travail comme des services, une fiscalité légère, une hyper valorisation boursière, et une nouvelle division internationale du travail (qui s’organise au sein même des GAFAM) ? Ce capitalisme là semble plus que jamais avoir le vent en poupe au point que le véritable enjeu pour le futur sera de savoir si l’Etat aura le moyen de résister à son offensive ou en deviendra le simple instrument.

    La montée des courants populistes notamment en Europe témoigne d’un esprit de résistance dont les promoteurs semblent prêts à échanger une reconquête de leur souveraineté nationale contre une baisse du niveau de vie.
    Mais seule la Chine parait aujourd’hui suffisamment puissante pour se constituer en rivale et attirer autour d’elle une partie des pays qui refuseront l’hégémonie américaine des GAFAM. Et elle sera aidée dans son affirmation propre par le fractionnement du paysage international, la montée des protectionnismes et l’affaiblissement des institutions internationales, toutes évolutions engagées avec la Covid-19 mais que celle-ci a accentuées.
    L’Europe risque dés lors d’être la grande perdante de cette nouvelle donne…
    …sauf à voir émerger dans les démocraties une coalition porteuse de la volonté politique de changer les règles fiscales et casser les monopoles que constituent les GAFAM comme le RGPD en a été l’esquisse.

    Lire le robuste ouvrage (au moins la première partie) de l’ancien économiste en chef de la Banque Mondiale, Branko Milanovic, Le capitalisme sans rival (La découverte, 2020), permet de bénéficier d’un éclairage différent mais complémentaire. Pour lui, la nouvelle donne associée à la révolution des NTIC, c’est la réduction des inégalités mondiales et plus encore la part désormais prépondérante prise par l’Asie dans le PIB mondial ( 43% contre 37% à l’Occident).

    Mais c’est surtout le face à face incertain de deux capitalismes :

    •Un capitalisme méritocratique et libéral d’abord, dont les Etats-Unis d’Amérique sont l’archétype, se distingue désormais nettement du modèle social-démocrate qui l’a tout juste précédé. L’augmentation de la part du Capital dans la richesse globale que l’on y constate (loi de Bowley), et qui conduit mécaniquement à une hausse des inégalités internes (du fait de sa concentration), s’accompagne de trois novations (illustrées d’ailleurs par de passionnants graphiques) : le fait que les détenteurs du patrimoine le plus élevé bénéficient aussi des plus hauts revenus tirés du travail (les capitalistes les plus riches et les travailleurs les mieux payés sont de plus en plus souvent les mêmes personnes) ; une tendance renforcée à l’endogamie au sein des catégories les plus aisées; et un développement de la transmission inter-générationnelle des inégalités.

    Ce triple processus est facilité par l’épuisement des dispositifs appelé à le brider: non seulement le pouvoir de négociation des syndicats s’est affaibli, mais la démocratisation de l’enseignement a probablement atteint son plafond tandis que la hausse des prélèvements se heurte à une résistance de plus en plus forte.

    Ce qui aboutit à la constitution et à la pérennisation d’une classe supérieure assez nombreuse et influente politiquement (des « renards » au sens de Pareto #les « lions ») pour faire obstacle au changement.

    Faute de pouvoir ralentir la hausse de la part du capital, qui correspond selon l’auteur à une tendance lourde, celui-ci suggère, comme programme de réforme, d’en repartir plus également la détention en favorisant l’actionnariat populaire et salarié, ou/et en taxant plus lourdement l’héritage (au contraire des pratiques observées).

    •A ce « modèle » s’oppose, selon Branko Milanovic, un « capitalisme politique » (une dizaine de pays représentant un quart de la population comme de la production – en PPA- mondiales) presque toujours issu de révolutions communistes menées dans des sociétés colonisées : le communisme leur aurait permis de sortir de la féodalité pour paradoxalement construire un capitalisme endogène que l’impérialisme empêchait. Le socialisme aurait ainsi été une transition vers le capitalisme défini par la propriété privée de la majeure partie des moyens de production (en Chine la part de l’Etat ne serait plus que de 30% de l’investissement, 20% de la production industrielle – nulle dans l’agriculture – et de 9% de l’emploi total) ; le statut de salarié des travailleurs ; la décentralisation de la prise de décision (pour 93% des marchandises vendues au détail, 79% des produits agricoles, 81% de la production industrielle).

    De ce capitalisme politique, Branko Milanovic dresse à son tour le profil, qui se caractérise par l’absence d’état de droit contraignant, l’efficacité de la bureaucratie, et la suprématie du parti unique sur les intérêts économiques dans un esprit nationaliste et mercantiliste. Sa faiblesse tient aux deux contradictions qui lui sont intrinsèques : l’arbitraire (condition de la suprématie du politique qui doit pouvoir s’affranchir des règles chaque fois qu’il l’entend) contredit l’efficacité, la corruption, liée à l’arbitraire dont elle huile les rouages, accroît l’inégalité par ailleurs considérable et croissante, démentant les principes mêmes sur lequel le système est idéologiquement construit. Tout est alors question de dosage, rendant le modèle difficile à exporter. Outre la difficulté du gouvernement chinois à « considérer » ses interlocuteurs tant il reste convaincu de la supériorité de sa civilisation, les caractéristiques de son organisation restent très particulières. D’où le déploiement d’un réseau d’influence accompagnant ses investissements à l’étranger, plutôt que la constitution de véritables alliances.

    Branko Milanovic parie ainsi sur une cohabitation brinquebalante des deux capitalismes appelés selon lui, faute d’alternatives souhaitables, à se survivre à eux-mêmes…

    Pas de mot clé.

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